Le colonel Howards raccrocha violemment le téléphone et tapa du poing sur la table en lâchant un juron devant ses subordonnés :
« Les c… ! ils attaquent carrément le bled… »
Jamais pensa t-il, je n’aurais dû envoyer pour une reconnaissance en force les compagnies « Able » et « Bravo » de ce p….. de 2ème bataillon…
Au cours de l’affaire du Bois des trous , ces deux compagnies avaient été bloquées tout un après midi par des « Ost Truppen » et depuis, ses hommes étaient la risée du régiment.
Pensant leur donner l’occasion de se racheter, Howards leur avait confié la mission.
En effet, en temps normal ce type d’opération ne nécessite qu’un engagement limité, à base d’infiltrations et de harcèlement pour obliger l’adversaire à dévoiler ses positions.
La dotation en munitions tant pour les 105 que pour les mortiers de section avait d’ailleurs été faite dans ce sens, avec les conséquences qu’on verra plus tard.
Du côté allemand, le calme relatif des jours précédents et le manque d’informations des premières lignes* a incité le commandement allemand à rallonger encore le front de la 3ème Fallschirmjager division du général Schimpf .
Celle-ci avait donc en charge un front de 24 km avec peu de réserves et sans espoir de renforts.
Le hameau de Neuville était tenu avec juste deux sections renforcées.
Les actions de « Able » et « Bravo » débutèrent par un feu d’artillerie et de mortiers qui, s’il fut d’une relative efficacité, eut pour conséquence immédiate d’alerter les défenseurs de Neuville.
Les premiers mouvements américains se trouvèrent, comme souvent, pris sous les tirs croisés de mortiers, mitrailleuses et d’une pièce légère de F.L.A.K. lui occasionnant des pertes sévères.
A gauche surtout, la compagnie A après avoir éliminé le canon de 20 automoteur et repoussé ½ section para s’épuisa devant des éléments de ferme, perdant même une section au cours d’une charge.
La compagnie « Bravo » , dirigée par un officier ayant tiré les leçons d’un mois de combats depuis le débarquement avança de manière plus méthodique.
Le choix tactique de deux sections en pointe et une autre en réserve immédiate pour en « garder sous le pied » montra son efficacité jusqu’au abords de l’église du bourg.
Arrivé là on pensa que, vu les pertes, le flottement de la compagnie A et l’arrêt des tirs d’artillerie et de mortiers faute de munitions, l’affaire était entendue.
Mais l’allemand, dans l’obligation de tenir le carrefour de Neuville, regroupa ses maigres effectifs au centre du village, ce qui permit aux G.I’s , faisant preuve d’une surprenante capacité de récupération, d’en faire autant.
Dispersés entre les différents blocs d’habitations, soumis à des tirs croisés et des difficultés d’approvisionnement, les paras commencèrent à faiblir.
L’entrée sur la table d’une section de « Sherman » et d’une d’infanterie mécanisée pour consolider la position incita les derniers survivants à évacuer le bourg.
On peut dire que la mission a été accomplie; au prix fort et de justesse, mais l’affaire du Bois des trous est oubliée ; le bataillon peut à nouveau marcher la tête haute…
*avec leur sentiment de supériorité par rapport aux unités alliées, les paras allemands avaient pris l’habitude pendant les combats de l’année 1943 et début 1944 en Italie de ne pas communiquer à leur commandement la perte telle ou telle position, tant était grande leur certitude de la reprendre sans délai.
Habitude qui persista en partie en Normandie…
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